Je dénonçais, dans mon texte précédent, l’archaïsme du système électoral français qui confère tous les pouvoirs aux mains de ceux qui ont rallié le plus de suffrages lors du vote, qu’importe les conditions de ce vote.
Ce système engendre un phénomène permanent de conflit, de tension et de rivalité, là où des solutions plus démocratiques, comme une répartition des sièges au prorata du résultat, permettent de travailler en commun en faisant des compromis, voire en aboutissant à un consensus.
Cette tension et cette rivalité engendrent des comportements irrationnels de ceux qui rentrent dans le jeu, soit en participant à une liste, soit en soutenant une liste. On arrache certaines affiches, on « bannie » les adversaires de ses pages dans les réseaux sociaux (je n’ai jamais pu accéder à la page de campagne de M. Schielin sur Facebook par exemple), etc.
Durant cette campagne, nous avons eu une autre illustration de cette agressivité. Ainsi, le tract de caniveau que nous avons eu dans les boites aux lettres, juste avant la clôture de la campagne, n’est-il pas quelque part la preuve que des personnes intelligentes, socialement établies, très sympathiques, en arrivent à cautionner ce genre de vomi en le distribuant ou en l’écrivant ? L’auraient-elles fait dans un autre contexte ? Je ne le crois pas.
Et c’est terrible, car au-delà du contenu parfaitement abject du tract, le procédé a de quoi surprendre. Que penser, en effet, de mes anciens colistiers qui, alors qu’ils étaient comme moi dans l’équipe de M. Hoff en 2014, se plaignaient et critiquaient un tract du même acabit distribué par l’équipe de M. Schielin ?
Ironie du sort, M. Riegert est victime d’un procédé qu’il avait lui aussi cautionné avec succès 6 ans plus tôt. Dans le domaine de la spiritualité, on appelle cela l’effet boomerang. Sauf qu’aujourd’hui, il détient les clés de l’élection, car il a la loi pour lui et tous les éléments pour faire annuler le scrutin : en effet, la loi du 14 avril 2011 interdit de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale juste avant l’organisation du scrutin sans donner la possibilité aux adversaires électoraux d’y répondre avant la fin de la campagne.
Or, ce tract nous apprend, sous le prétexte fallacieux d’attaques dans les réseaux sociaux (en dehors de l’histoire du drapeau français le 8 mai, il n’y a eu aucune attaque), et toujours au conditionnel (le « il parait que » est la lâcheté suprême des pleutres qui n’assument rien) que M. Riegert aurait détourné de la nourriture au profit de son restaurant lors du repas des ainés (ndlr : de 2017). Si ça, ce n’est pas une polémique électorale juste avant l’organisation du scrutin, il faudra me définir ce que c’est alors… Et tout porte à croire que ce tract a considérablement influencé le vote et sans doute contribué à accroître l’abstention.
Plus intéressant. Si on prend la peine de bien lire et analyser ce qui y figure, on comprend mieux le mode de fonctionnement de M. Schielin ; grand seigneur, il est prêt à accorder son pardon (sa confiance, dit-il…) à condition qu’on se soumette et qu’on lui reste d’une fidélité à toute épreuve. Et qu’importe les articles 19 et 40 du code de procédure pénale qui font obligation aux maires d’informer sans délai le procureur de la République de tout crime, délit et contravention dont ils ont connaissance en leur qualité d’officier de police judiciaire.
D’un point de vue légal et moral, au moment des faits, il appartenait à M. Schielin de dire si M. Riegert avait fauté, auquel cas il lui incombait, en sa qualité de maire (art. 40) et d’officier de police judiciaire (art. 19), d’informer le procureur au nom de la loi et de notre intérêt commun à tous. Soit il n’y avait aucune faute de constituée et M. Schielin devait se taire.
Se servir d’une « affaire » sortie de son contexte, trois ans après, pour nuire à la réputation de son adversaire politique dans un tract électoral illégal, relève d’une bassesse immonde et indigne. Sincèrement, je n’ai pas envie d’un maire capable de coups aussi bas, nous pourrions bien être ses prochaines victimes, car l’acte est révélateur d’une mentalité.
On le voit, non seulement ce système corrompt les âmes, même des colistiers honorables de M. Schielin, mais il récompense ceux qui arrivent à détourner la loi sans se faire prendre… Personnellement, j’espère que M. Riegert contestera ce vote, car si la représentativité de M. Schielin repose sur un tel procédé, ça en dit long sur ce qui nous attend pendant les six années à venir. À chaque fois que le malin passe un cap sans se faire prendre, il s’ouvre de nouveaux horizons jusqu’au jour où il se fait prendre par la patrouille ; c’est l’ancien gendarme qui vous parle.
Pensez-vous qu’un seul parti politique, un seul politicien osera remettre en cause un tel système si avantageux pour eux ? La liste « Waldighoffen, réveille-toi ! » avait proposé d’être plus intelligents que ceux qui nous manipulent pour mieux se servir, mais sans prise de conscience, difficile de se faire entendre… Aujourd’hui, nous avons les élus que nous méritons.
Jean-François Mattler
Voilà qui est bien dit